BEYROUTH ENTRE PARENTHÈSES, par Sabyl Ghoussoub

Premières phrases

Israël, pays illégitime

Dans l'avion qui me mène a Tel-Aviv, je me souviens d'un ministre israélien qui avait promis de rayer le Liban de la carte du monde. Des histoires de chars israéliens qui écrasaient les voitures et leurs conducteurs dans Beyrouth. De corps suspendus sur un poteau, pliés en douze dans des cage de soixante-quinze centimètres, flagellés avec des câbles éléctriques au centre de torture de Khiam.

Pourquoi ce livre

J'ai sans doute déjà du le dire : le Moyen-Orient est une de mes marottes de lecture. Durant l'été 2019, j'ai aussi passé deux semaines au Liban chez des franco-libanais qui y retournent chaque été et qui y ont une maison au dessus de Byblos. C'est un pays au sujet duquel j'avais des réticences car une chasse acharnée aux oiseaux migrateurs y est pratiquée, bien souvent juste pour le "sport" et l'amusement des plus riches. Il y a sur Médiapart une série de quatre articles éclairants. Ils datent un peu et j'ai l'impression que les autorités essaient d'être davantage dans la répression. Il y a aussi de nombreux libanais "civils" qui s'insurgent et se fédèrent, par exemple via la Society for the protection of nature in Lebanon (SPNL), soutenue par Birdlife International, une ONG à laquelle est aussi rattachée la LPO France.

Heureusement, le Liban ne se limite pas aux braconniers/chasseurs. J'ai découvert un pays fascinant, certes meurtri par les guerres récentes et encore latentes, dans une postion géopolitique compliquée entre la Syrie et Israël. Je me suis davantage interessée à la politique et à l'histoire du pays, de son rapport avec Israël, justement, à Saint Charbel, dont j'ai découvert l'existence, en passant par la place des Croisés dans l'histoire du pays. Anecdote amusante : alors que nous visitions le Château de Gibelet, le chanteur Marc Lavoine répétait juste à côté pour un concert prévu le même soir !

Ma lecture

Le narrateur franco-libanais (qui est peut-être l'auteur, Sabyl Ghoussoub ?) raconte son cheminement vis à vis d'Israël, ce pays où lorsqu'on est libanais, on n'y va pas. Et pourtant, écrit-il "A force d'entendre parler d'Israël depuis que je suis petit, haïr ce pays à tout va, le voir condamner de tous les maux de la planète, je n'ai eu qu'une seule envie, m'y rendre".

Le voici donc muni de son passeport français, en vol pour Tel-Aviv. Lors de son passage à la douane, il est malgré tout arreté et conduit à l'écart. Commence alors un interrogatoire de plusieurs heures.

Comment vous appelez vous ?

Votre nom de famille ?

Où êtes-vous né ?

Comment s'appelle votre mère ?

Où est-elle née ?

Comment vous appelez vous ?

...

Les contacts de son téléphone portable sont épluchés, les photos qu'y s'y trouvent également, de même que celles retrouvées au hasard d'internet. L'interrogatoire n'en finit pas mais les pauses sont suffisantes pour que l'esprit du narrateur nous emmène dans les méandres des relations entre les deux pays, vers l'absurdité des frontières entre les hommes, ses rencontres avec Hussein à Téhéran, Rose à Tel Aviv, ou Assaf, son "double israélien", juif d'origine irakienne.

Où habitez-vous ?

A Paris

Mais encore ?

A Beyrouth.

Je ne comprends pas.

Moi non plus madame.

J'ai été très émue par tout le texte, récit non pas des différences mais de ce qui réunit les peuples. 

c'est toute la tristesse des barrières que les humains, les gouvernements, érigent entre eux qui est racontée.

Infos

Beyrouth entre parenthèses, par Sabyl Ghoussoub - Ed. L'Antilope 2020